Éloge des bâtards

• Le mood :

Une dystopie étrange, poétique et quelque peu fantastique dans laquelle un cercle de déclassés, de bâtards qui ne donnent pas leurs noms se dresse contre une société qui surveille, asservit et détruit.


• L’histoire :

Et si les actes invisibles devenaient nos plus grands cris ?
Si nos mots, aujourd’hui brandis dans les rues se perdaient dans trop de bruit ?
N’est-ce pas entre nous qu’il faudrait parler ?

Lily a d’étranges pouvoirs télépathiques.
Les vies des autres la submergent, l’envahissent.
En même temps que la ville qu’elle connaissait disparaît.
Détruite et reconstruite pour accueillir une population trop nombreuse.
Réorganiser le trafic.
Espace quadrillé, ergonomique.
Plus aucun hasard.
La panique de ne plus jamais être soi, exister.

« Ni mon immeuble, ni mon ancien appartement ne sont plus là pour servir de preuve à mon existence antérieure, je n’ai presque aucun moyen de rappeler à moi qui j’ai été, qui je suis. »

Les esprits se connectent et la rébellion est en marche.
Neufs personnages entrés en désobéissance contre la la politique urbanistique et ce monde qui les menace de les engloutir.

 

« Nous sommes unis par des actions clandestines destinées à empêcher la disparition complète de notre ville. »

Tant qu’ils sont connectés et agissent ensemble ils sont plus forts.
Pour agir ils décident d’abord de ne rien se dire de leur passé.
Mais si justement, c’était leur passé qui justifiait leurs actes ?

Pourtant une voix perce ; Fox a été abandonné par son père,
Qu’il cherche inlassablement dans les corps d’autres hommes.

« Je lui en ai voulu d’avoir pas même livré un signe, c’est comme si les pères se taisaient exprès pour qu’on les oublie jamais. »

Et là, comme des enfants perdus,
La voix de Fox et son histoire tissent des ponts entre eux.
Comme des gosses, ils s’insurgent ou se moquent gentiment.
Suspendus à cette histoire qui va délier les langues de chacun.

Ils se rassemblent à la nuit tombée,
Imaginent des actions silencieuses contre le pouvoir.
Des pancartes sans rien écrit dessus.
De l’herbe envoyée aux gens.

« Je ne crois pas que dans nos régions il y ait encore des troupeaux qui circulent librement sur des pâtures. Les naissances sont génétiquement régulées et les prés ont laissé place depuis bien longtemps à de grands ensembles. Il y a beaucoup de corps humains et beaucoup de familles et beaucoup de linge et beaucoup de drames sur un espace très étroit. »

Puis vient l’histoire de Macha.
Le père inventé.
Les mensonges pour survivre.
La réalité des autres.

Le petit groupe agit contre la loi.
Distribue des peluches à la banque mondiale,
Installe des miroirs pour marcher sur le ciel,
Indique chaque herbe qui se faufile entre deux dalles de béton.
Dérisoire et si symbolique.

« On a saturé la ville de signes invisibles. »

Des signes invisibles…
L’union se forme, un lien se forge dans le fer des nuits désertes.
Des abandonnés.
Des bâtards. Des drogués.
Des noms à une syllabe.
Des noms pour s’en débarrasser,
Des noms que l’on crie.
Des fils que l’on crache.

À tour de rôle la solidarité s’érige
Une étrange ronde de coeurs béants, en errance.


• L’extrait :

« Mes amis étaient des déclassés d’origine. »


• Mon avis :

Étrange lecture que ce livre.
Si j’ai trouvé une forme de lenteur au début,
Au bout d’une trentaine de pages j’ai infiltré totalement ce petite groupe d’insurgés, de bâtards nés.
Un sublime message d’ouverture, de résistance si petite soit-elle.
On ne changera pas notre monde,
Mais en renouant le dialogue, en désobéissant nous pouvons ralentir les choses…

Le récit porté par Lily et leurs voix singulières m’ont accompagnée.
La poésie de leur désobéissance m’a touchée.
L’écrivaine fait voyager ses personnages à travers les éléments, leur premier RDV dans les airs, en haut d’une tour de 33 étages.
Puis le second sur l’eau. Lorsque les actions qui les fédèrent sont pour taire le chaos de notre Terre.


• L’auteur :

Olivia Rosenthal

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*Olivia Rosenthal est née à Paris en 1965. Depuis 1999, elle a publié sept récits aux éditions Verticales et a obtenu le prix Wepler pour On n’est pas là pour disparaître (2007). Sa première pièce, Les Félins m’aiment bien, a été créée en janvier 2005 à Saint-Denis, dans une mise en scène d’Alain Ollivier avec Valérie Crunchant (Cérès) et Florence Payros (Marianne). Depuis, elle a écrit Les Lois de l’hospitalité qui a été mis en scène par Marie Vialle aux Subsistances à Lyon en avril 2008.

Par ailleurs, elle réalise régulièrement, en collaboration avec des cinéastes (Olivier Ducastel, Laurent Larivière), des écrivains (Denis Lachaud, Michaël Batalla, Patrick Chatelier), des chorégraphes (Julia Cima) ou des metteurs en scène (Robert Cantarella) des performances pour divers lieux et festivals (festival d’Avignon ou de Manosque, Ménagerie de verre, Subsistances de Lyon, Lieu Unique à Nantes, Scène nationale de Poitiers, Théâtre National de Bordeaux Aquitaine…).

En 2008, elle achève une pièce sonore intitulée Viande froide pour le Cent-Quatre, lieu culturel (ouvert à l’automne 2008 à Paris) où elle a été accueillie en résidence en 2006/2007. Elle est auteur invitée au Grand R (scène nationale de La Roche-sur-Yon), durant la saison 2008-2009 où elle présente ses travaux en cours.
Olivia Rosenthal travaille dans son œuvre, de manière volontairement humoristique, sur le rapport entre l’individu et les communautés auxquelles il appartient. Ses livres suivent le parcours intérieur de personnages qui sont toujours sur le point de rompre leurs liens et de transgresser ainsi les interdits qu’eux-mêmes se sont forgés pour rester dans le rang.

« On n’est pas là pour disparaître » aux Éditions Verticales reçoit le Prix Wepler 2007.
« Que font les rennes après Noël ? » lui est couronné par les Prix Alexandre-Vialatte 2011, Prix du Livre Inter 2011, Prix Ève Delacroix 2011.
« Ils ne sont pour rien dans mes larmes » sort en 2012 et « Mécanismes de survie en milieu hostile » en 2014.

*Source : Babelio


• Références :

  • Éloge des bâtards
  • Auteur : Olivia Rosenthal
  • Maison d’édition : Les escales
  • Date de publication : 22.08.2019

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