
• Le mood :
ÉDEN, roman initiatique, envoûtant et brûlant qui prend place au coeur d’une forêt amérindienne. Une nature toute puissante d’autant plus lorsque l’homme la menace.
• L’histoire :
« L’esprit de la forêt était là, juste derrière le drap qui remuait dans l’air, tel un rideau ouvrant sur un autre monde. (…) Il ne portait rien d’autre, sa peau aussi blanche que le poitrail d’une biche, ses pieds nus, menus, dans la terre. »
Martha n’aura de cesse de le répéter.
Ce n’était pas Lucy.
C’était l’esprit de la forêt qu’elle a vu ce jour-là.
Lucy, une jeune lycéenne blonde
Est retrouvée nue, violée, au pied d’un arbre dans la forêt.
Elle ne parle plus.
Une ambiance de fin du monde.
Entre la forêt amérindienne et l’autoroute.
Entre les battements d’ailes des oiseaux de la réserve
Et le chant des camions des hommes blancs
Transportant des troncs arrachés à la nature.
Nita est une jeune lycéenne amérindienne.
Elle a grandi au milieu des histoires de la forêt.
Elle nous raconte.
Les animaux totem et gardiens des hommes.
Les hommes qui deviennent un jour des animaux.
L’air du monde qui les traversait.
« Comment savoir ce que vivent les autres ? Nous sommes prisonniers de notre intériorité, (…) »
Féminicides.
Brisent la nature.
Et embrument toute mémoire.
Lucy était cette jeune fille lointaine et mystérieuse au fond du bus.
Écho de la biche morte sur le talus.
Les jeunes filles de la réserve la toisaient.
La violence est partout.
La survie est ailleurs.
« Peut-être ne sommes-nous que cela, des créatures rêvant de s’asseoir sur un siège passager, attendant d’être conduites ailleurs, n’importe où. »
Les garçons abusent des corps suintant de désir des jeunes filles.
Et ces créatures du Hollywood de la forêt offrent leurs corps aux hommes de la nuit.
Mais tout est danger.
Les mères oublient d’en être.
« À la maison, je la surprenais inspectant son reflet dans la porte du réfrigérateur. Elle paraissait gonflée de désir et de terreur (…) »
Et Nita joue avec les flammes et les jeunes hommes.
Des hommes sont retrouvés éviscérés par des bêtes sauvages.
Et si les esprits se réveillaient pour venger les pères disparus ?
« Peut-être que rien ne ressemble plus à la mort que l’instant où l’on s’apprête à naître.
Au Hollywood, c’était moins les hommes qui m’importaient que le regard des filles qui me mettait au monde. »
Une ville qui ne dit pas le nom des viols.
Qui voit les hommes partir et les femmes chercher leur vie dans des tarots.
Les glissements d’univers sont-ils possibles ?
Peut-on choisir d’appartenir à un monde plutôt qu’à l’autre ?
Et s’il fallait juste ne pas s’approcher des oiseaux ?
• L’extrait :
« Il est étrange de réaliser qu’avant que nos vies basculent pour toujours, rien ne l’annonce – ou peut-être que tout l’annonce, mais depuis si longtemps, et de façon si continue, que cela revient au même, le message est devenu inaudible. »
• Mon avis :
Un grand coup de coeur pour moi que ce dernier roman de Monica Sabolo.
Si l’on retrouve des éléments qui font l’écriture de l’auteure ; comme le lac, l’adolescence, le viol et la nature, l’intrigue prend place dans un monde tout à fait différent.
J’ai eu envie de le lire auprès d’un feu, entourée de pierres ésotériques.
J’ai été totalement transportée par ce récit qui recèle d’esprit et de sorcellerie des mots.
Mes yeux s’illuminaient des décors, de la peur et du mystère brûlant.
Une intrigue sauvage et cruelle à l’image de notre monde,
Mais avec des portes si belles, sur nos âmes qui, au-delà, vagabondent.
• L’auteur :
Monica Sabolo

Monica Sabolo est une journaliste et écrivaine française, d’origine italienne. Elle vit à Paris.
Elle est journaliste (Elle, 20 ans, Voici).
Après « Le roman de Lili », elle signe avec « Jungle » son second roman.
Elle reçoit le Prix de Flore 2013 pour « Tout cela n’a rien à voir avec moi ». Dans ce roman, Monica Sabolo dissèque le chagrin d’amour. À mesure que Monica Sabolo raconte son histoire d’amour et son épilogue, elle se replonge dans son passé. Son chagrin d’amour fait écho avec celui d’une autre avant elle, sa mère. Mais c’est surtout la forme du livre qui séduit la critique.
En 2017 est publié son roman « Summer », qui est finaliste du Prix Goncourt des lycéens, et finaliste du Prix du roman des étudiants France Culture – Télérama.
• Références :
- ÉDEN
- Auteur : Monica Sabolo
- Maison d’édition : Gallimard
- Date de publication : 22.08.2019