Les gratitudes

• Le mood :

Un livre sublime sur la fin de vie.
Nos libertés qui disparaissent. Les corps qui ne sont plus ni touchés, ni caressés.
Un livre qui mêle l’humour des mots qui se perdent à la profondeur de ce qu’ils abritent.


• L’histoire :

Dès les premières pages,
J’ai repensé à mon émotion lors de la sortie de Amour de Haneke.
Le couloir, l’oiseau, le bol et les mots qui s’échappent.
Il y a des sujets qui vous chamboulent plus que d’autres.
Mais si le monde est injuste à bien des égards,
Il n’oublie pourtant personne à la fin.
Nous vieillirons tous.

« Compter, devoir, est-ce ainsi que se mesure la gratitude ? (…)
Alors je repense aux derniers mois, aux dernières heures. Nos conversations, nos sourires, nos silences. Me reviennent les instants partagés. D’autres ont disparu. Et s’inventent ceux que j’ai manqué. »
Combien de fois avez-vous dit « merci » en le pensant réellement ?
Remerciez-vous chaque jour la vie ?
Michka voit s’envoler les mots qui s’entrechoquent contre d’autres
Qui n’ont de sens que pour celle qui les prononce.
Un jour tout bascule.
Et personne ne nous apprend à désapprendre.
Personne ne peut nous guider là où nous nous sommes perdus.
Les voyelles se dérobent.
Elle sait qu’elle perd quelque chose.
Apeurée comme une petite fille.
Figée au milieu de son salon.
Elle entre dans un Ehpad.
Accompagnée de Marie, cette jeune femme qu’elle a protégée enfant.
Elle referme doucement la porte de cet appartement qu’elle déserte.
Dans lequel elle ne reviendra plus.
Comme si elle y enfermait une vie qui ne lui appartenait plus.
Quand tout va toujours plus vite autour de nous,
Comment se termine la lenteur de nos vieux jours ?
« (…) mais chacune de ces phrases est une insulte à la femme qu’elle a été. »
Le mépris pour les êtres que nous avons été.
L’oubli du temps où nos corps beaux et jeunes exultaient.
Gravir une vie pour en chuter.
« Quand je les rencontre pour la première fois, c’est toujours la même image que je cherche, celle de l’Avant. Derrière leur regard flou, leurs gestes incertains, leur silhouette courbée ou pliée en deux, comme on tenterait de deviner sous un dessin au vilain feutre une esquisse originelle. Je cherche le jeune homme ou la jeune femme qu’ils ont été. »
Avec Jérôme l’orthophoniste, la vieille dame redevient coquette et espiègle.
Retrouve parfois les mots.
Mais elle sait que l’esprit titube.
Et elle ne veut pas raconter des histoires de vieilles.
Marie et Jérôme ne se connaissent pas.
Michka sera le lien entre leurs deux histoires.

Des vies parallèles dont Michk’ est le point de fuite.

« Quand je m’imagine vieille, vraiment vieille, quand j’essaie de me projeter dans quarante ou cinquante ans, ce qui me parait le plus douloureux, le plus insoutenable, c’est l’idée que plus personne ne me touche. »
Plus personne ne frappe.
Votre chambre est un couloir.
On vous infantilise.
Les somnifères.
La liberté n’est plus qu’une idée.
« – Pour être libre ?
    •  Oui. Libre, c’est ça. Juste savoir. Que c’est fossible de… partir. Tant qu’il est encore chant. »
Renoncer.
Moi aussi j’en perds les mots.
Ils viennent en désordre,
J’imagine.
Je me souviens.
Je m’en veux.

De la solitude dans laquelle nous laissons nos vieux.


• L’extrait :

« Mais je me tais.
Parfois il faut assumer le vide laissé par la perte.
Renoncer à faire diversion. Accepter qu’il n’y a plus rien à dire.
Me tenir assis, près d’elle.
Lui prendre la main. »

• Mon avis :

Delphine de Vigan revient avec un livre magistral et d’une humilité incroyable face au thème qu’elle aborde.
Elle y dépose la profondeur de la perte.
La perte des mots, la perte d’amour, la perte du contact sur la peau.
Tout en faisant vibrer la résonance de deux histoires qui se joignent.
J’ai terminé cette lecture totalement chamboulée.
J’étais si heureuse de la retrouver…


• L’auteur :

Delphine de Vigan

delphine_de_vigan
Copyright > Hannah Assouline

*Delphine de Vigan est une romancière française.

Son premier roman, « Jours sans faim », est paru en 2001 aux éditions Grasset sous le pseudonyme de Lou Delvig, pour ne pas heurter sa famille..

En 2007, « No et moi » reçoit le Prix des Libraires. Ce « roman moral » à succès sur une adolescente surdouée qui vient en aide à une jeune SDF a été récompensé par le prix du Rotary International 2009 et par le Prix des libraires 2009. Il a été traduit en vingt langues et une adaptation au cinéma a été réalisée par Zabou Breitman, film sorti en novembre 2010.

En 2008, Delphine de Vigan a participé à la publication de « Sous le manteau, » un recueil de cartes postales érotiques des années folles.

En 2009, elle a été récompensée par le « prix du roman d’entreprise, » décerné par deux cabinets de conseil (Place de la Médiation et Technologia) avec le soutien du ministre du travail de l’époque Xavier Darcos, pour ses « Heures souterraines » (Jean-Claude Lattès) qui a également obtenu le prix des lecteurs de Corse en 2010. Le roman a été adapté pour Arte par Philippe Harel.

En 2011, elle obtient le prix du roman Fnac, le Prix Roman France Télévisions et le Prix Renaudot des Lycéens pour « Rien ne s’oppose à la nuit, » ainsi que le grand prix des lectrices Elle 2012.

Toujours en 2011, elle co-scénarise le film de Gilles Legrand « Tu seras mon fils » avec Niels Arestrup et Lorant Deutsch.

En 2012, elle signe la préface de la BD de sa sœur Margot « Frangines, et c’est comme ça. »

En 2015, elle a publié un nouveau roman « D’après une histoire vraie » couronné par le Prix Renaudot et le Prix Goncourt des Lycéens. Le roman est adapté pour le cinéma par Roman Polanski avec Éva Green et Émmanuelle Seigner.

Mère de deux enfants, elle vit avec le critique littéraire, reporter et animateur d’émissions culturelles de radio et de télévision, François Busnel.

(*Source : Babelio )


• Références :

  • Les gratitudes
  • Auteurs : Delphine de Vigan
  • Maison d’édition : Éditions JC Lattès
  • Date de publication : 06.03.2019

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