Monica Sabolo – Interview • SUMMER•

– Bonjour Monica,

Vous savez tout l’admiration que j’ai pour vous et votre écriture.
J’ai tenté de poser des questions qui, j’espère, rendront honneur à votre roman Summer et sa sortie en format Poche.

• Vous avez construit votre livre, Summer, comme un véritable thriller.
Summer, kidnappée au bord d’un lac.

Son frère qui n’aura de cesse de chercher, de comprendre. 
Et votre style est d’une poésie folle, là où certains grands auteurs nord-américains s’attachent parfois plus à l’intrigue qu’au style.
Comment écrivez-vous ?
Comment est née cette histoire ?

M.S : J’écris dans mon lit, entourée de tas de trucs, livres, café, téléphone portable, cigarette électronique, carnet de notes. (J’ai un bureau, rangé, idéal, jamais utilisé).

La naissance d’une histoire est toujours mystérieuse. Bizarrement, mes trois derniers romans sont partis d’un lieu, même d’un milieu naturel. Pour Crans-Montana, c’était la montagne, le blanc, le givre. Summer est né de l’envie d’écrire sur l’eau, et le lac Léman.  J’ai grandi à Genève, et le lac a laissé une empreinte quasi physique dans ma mémoire.


• Summer est issue d’un haut milieu social.
Ce choix n’est pas anodin.

Il y a cette fascination et cette récurrence du milieu bourgeois, hype, dans votre écriture. Pouvez-vous nous en dire plus ?

M.S : Je ne sais pas si je parlerais de fascination. Mais c’est un milieu qui m’a été familier durant mon enfance et mon adolescence. Il est parfois plus facile d’écrire sur ce que l’on connaît, cela permet d’apprivoiser, en partie, un sentiment d’imposture.

C’est aussi un milieu qui permet les projections, aussi bien esthétiques que morales, les fantasmes, et, qui par ses codes, son attachement à la réussite, la convention et les apparences, constitue un terrain romanesque idéal, un espace propice à l’apparition du mal.


• Le cœur de votre roman parle de la construction dans l’absence de l’autre.
Du mensonge. Des non-dits.

Pensez-vous que nous sommes souvent le fruit des mensonges de nos parents ? 

M.S : Je suis fascinée par le silence, les non-dits, et les secrets de famille, ces passagers clandestins qui voyagent, parfois d’une génération à l’autre, diffusant leur poison, sans bruit. Mais je ne pense pas que nous soyons le fruit du mensonge de nos parents, ce serait affreusement sombre et désespéré. La famille que je décris dans Summer est désaxée, personne n’est à sa place, elle est une sorte d’enfer parée des atours de la réussite.


Dans Summer vous tissez un récit extrêmement poétique et une atmosphère sombre et aquatique.
Les algues, l’eau et le lac sont des éléments omniprésents dans votre récit.
Comment cela vous est-il venu ?
Est-ce qu’il y a quelque chose d’amniotique dans cet élément aquatique ?

 

M.S : Pendant l’écriture de Summer, j’allais presque tous les jours à la piscine. J’ai vraiment eu l’impression de passer un an sous l’eau. Il y a évidemment un lien à la mère, mais aussi à l’inconscient, au rêve. Le lac est changeant, il peut-être clair et scintillant, mais aussi sombre et glauque, il évoque le vivant et le morbide, l’amour et la mort, le passage des saisons, le silence, le caché, la mémoire…


• Benjamin se débat avec ses fantômes.
Pensez-vous, en tant qu’écrivaine être habitée de fantômes ?
Pensez-vous cela nécessaire au processus d’écriture ?

M.S : Il me semble que, dans mes livres, j’oscille toujours entre les fantômes et la fantasmagorie : il y a, d’un côté, le regard sur le passé, les choses ou les êtres qui on disparu, et d’un autre, le désir pour l’insaisissable, des êtres mythifiés, inaccessibles. Mes personnages sont en général prisonniers du passé, ou projetés vers un avenir qui s’échappe. Je ne sais pas ce que cela signifie, mais cela ne doit pas être très bon signe concernant mon équilibre psychique.



J’ai compris un élément clé de votre roman Summer en lisant votre précédent livre Tout cela n’a rien à voir avec moi… La chemise de nuit.
Je ne révèlerai rien à ceux qui ne vous ont pas encore lue.
Mais je trouve bouleversant et fabuleux de tisser un lien entre vos différents livres.
Est-ce une volonté de semer des morceaux de réponses au travers de vos différents romans ?
Continuerez-vous ?

M.S : Pour moi, bien qu’ils soient très différents, Tout cela n’a rien à voir avec moi, Crans-Montana et Summer constituent une trilogie. Il y a le même motif qui se dessine, les romans ont en quelque sorte le même cœur.
On retrouve des points de détail semblables d’un livre à l’autre, ce n’était pas volontaire, mais je suis toujours touchée quand un lecteur le remarque.
J’ai l’impression que quelque chose m’a échappé,  comme si le lecteur ramassait un objet que j’avais perdu en route, mes clés, par exemple, et me tapait gentiment sur l’épaule pour me les rendre.


• Êtes-vous en ce moment-même en processus d’écriture d’un prochain roman ?
Si oui, que pouvez-vous nous en dire ?

M.S : Oui, je suis en pleine écriture. Cette fois encore, le milieu a précédé l’histoire : je voulais écrire sur la forêt. Et je voulais aussi mettre du fantastique dans le roman, j’adore la littérature de genre.


 

Un grand merci au Livre de Poche de m’avoir permis de réalisé cette très belle interview de Monica 🙂

 


• Références :

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  • Summer
  • Auteur : Monica Sabolo
  • Maison d’édition : Livre de Poche
  • Date de publication : 02.01.19

 

 

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